5. De Salta à Uyuni, arrivée en Bolivie

Après quelques jours de repos à Salta, nous nous sommes rendus compte que les pluies qui nous accompagnaient toutes les nuits depuis deux semaines n'allaient pas cesser de sitôt et que cela comprommettait notre projet d'ascension du Nevado de Cachi (6380m) situé à quelques dizaines de km de Salta.

En effet, depuis juin 2010, un phénomène climatique appelé La Niña (la soeur du célèbre El Niño) perturbe tout l'est asiatique, l'Australie et l'Amérique du sud. Nous avons été confrontés à plusieurs reprises aux conséquences de ce phénomène lors de notre voyage. Nous avons par exemple observé des baleines au large du Pérou lors de notre traversée en bateau, ce qui est inhabituel et signe d'un refroidissement anormal de l'océan. Par la suite, à Mendoza, nous avons pu remarquer que cette région avait subi un hiver presque sans précipitations et souffrait d'une grande sécheresse. Inversément, le nord de  l'Argentine, une partie de la Bolivie et du Pérou viennent de subir des inondations exceptionnelles détruisant des centaines de maisons, coupant des routes et faisant parfois des victimes.

Dans l'espoir d'un retour du beau temps, nous avons donc décidé de prendre une semaine de "vacances" (sans le tandem) pour nous rendre en bus aux chutes d'Iguazu et découvrir la région de Misiones (merci à Magali et à Reynald pour les bons plans).

De retour à Salta, les conditions météo ne s'étant guère améliorées, nous avons renoncé à faire de la montagne et avons repris le tandem en direction du nord. Après bien des hésitations sur l'itinéraire à emprunter, nous avons décidé de rejoindre San Pedro de Atacama (nord du Chili) par le paso de Jama pour entrer ensuite en Bolivie par la traversée du Lipez (merci à Christelle et à Pierrot pour les infos détaillées). Notre dernière semaine en Argentine fut une des plus spectaculaires pour la beauté des paysages. Nous avons d'abord traversé un bout de "jungle" avant de rejoindre la Quebrada de Humahuaca et ses roches colorées (montagne aux 7 couleurs). Nous avons petit à petit pris de l'altitude pour aller en direction du paso de Jama qui est en fait une succession de 7 cols entre 3900 et 4800 mètres d'altitude. Le décors était grandiose et chaque jour différent: hauts plateaux taillés par des gorges, salines, lagunes avec des flamands, roches solitaires érodées par le vent, dunes de sable, volcans enneigés. Aucun problème pour trouver un emplacement de camping dans cette région désolée. En raison des distances importantes sans eau ou ravitaillement (160km sans rien entre la douane et San Pedro) nous avons donné à des chauffeurs des bidons d'eau à déposer à certains points précis au bord de la route. La route était lisse comme un billard et il n'y avait quasiment aucun trafic à part quelques camions paraguayens, vides en direction du Chili et remplis de voitures d'occasion en direction de l'Argentine.

Après cette traversée des Andes d'est en ouest, nous avons atteint San Pedro de Atacama, une petite ville-oasis perdue au milieu du désert. Quelques jours de repos nous ont permis de bien nous préparer pour la traversée du Lipez (infos sur les conditions des pistes, révision du vélo après avoir cassé 5 rayons de la roue arrière, achats de vivres pour 10 jours d'autonomie). Nous avons pu obtenir un topo détaillé du Lipez (merci Anne-Sophie et Benoit) et avons complété ces informations avec des impressions couleurs d'images satellites. Finalement, afin de ne pas passer une saison sans profiter de la bonne poudreuse, nous avons embarqué skis et surf de location sur le tandem et sommes partis en direction des dunes de sable pour faire quelques courbes.

Après la dolce vita à San Pedro, les choses sérieuses ont commencé: bienvenue au Lipez, avec ses pistes sableuses et caillouteuses, son isolement, ses nuits froides à une altitude comprise entre 4000 et 5000m et ses vents rugissants. Une fois passée la douane bolivienne, nous nous sommes rapidement retrouvés face aux laguna blanca et verde dominées par le volcan Licancabur. Nous avons du apprendre l'équilibrisme pour rester les deux sur le tandem le long de ces pistes assez techniques. Nous avons vite compris qu'il fallait se lever avec le soleil et profiter de rouler durant les heures du matin avant que le vent violent ne se lève. Les efforts furent largement récompensés par la beauté et la tranquilité des sites. A la laguna Chalviri, nous avons retrouvé notre sac de chocolats et de pâtes déposé par nos amis belges Laurence et Sébastien. Une fois les tours organisés partis, nous avons aussi eu droit à un jaccuzzi naturel (à 38 degrés) rien que pour nous sous un ciel magnifiquement étoilé. Nous avons été enchantés par les couleurs des geysers et la splendeur des couchers de soleil sur les lagunes remplies de flamands roses. Nous n'avons pas été surpris d'observer quasi quotidiennement des vigognes ou des lamas le long des pistes. Nous avons été, par contre, assez impressionnés de croiser des lièvres à longue queue (viscachas) et des petites autruches (suris). Globalement, nous avons rencontré de bonnes conditions (peu de poussage, des nuits relativement clémentes et toujours du soleil). Nous avons bénéficié de la gentillesse des chauffeurs de jeep qui ont accepté de déposer nos bidons d'eau à pluisieurs reprises. En compensation, nous avons par deux fois contribué à dépanner des jeeps bloquées.

Nous avons été étonnés par la vitesse à laquelle les tours organisés parcourent cette région (traversée de tout le Lipez en 2 jours). Beaucoup de personnes rencontrées se plaignaient de ne pas avoir assez de temps sur les sites, de toujours courir d'un endroit à un autre. Finalement, avec un point d'intérêt majeur tous les 30km, le vélo était un moyen idéal et suffisament lent pour profiter pleinement de ce parcours. Plus ici qu'ailleurs, nous avons compris combien ce n'est pas le nombre de lieux visités qui importe, mais le temps que l'on décide d'y passer.

En terminant le Lipez, nous avons appris qu'il ne serait pas possible de continuer vers le nord pour rejoindre le Salar d'Uyuni par San Juan, en raison des inondations dues à la Niña. Nous avons donc décidé de partir directement en direction de la ville d'Uyuni. Les derniers 150 km n'ont pas été un cadeau : piste cabossée et peu roulante, paysages monotones et vent de face.

Nous voici donc à Uyuni, pour digérer notre magnifique passage au Lipez et préparer la suite de nos aventures (le Salar d'Uyuni, inondé depuis plusieurs mois, se fera probablement à la nage plutôt qu'à vélo)...








Le perroquet bavard du camping à Iguazu.
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